Modification de la zone de chalandise par le service instructeur – insuffisance

Conseil d’Etat 25/01/06- SOCIÉTÉ BRICO 2- FÉDÉRATION JURASSIENNE DU COMMERCE et autres

Annulation de trois décisions du 13/01/05 par lesquelles la CNEC a autorisé la société « Les anciens établissements Georges Schiever et fils » à créer, à Lavans-lès-Saint-Claude (Jura), un magasin de bricolage « MAXIBRICO » de 2 000 m², un supermarché « ATAC » de 1 200 m² et une station-service attenante au supermarché de 113 m² avec 5 positions de ravitaillement.

Les associations et sociétés requérantes justifient de la capacité pour ester en justice et d’un intérêt leur donnant qualité à agir.

Le demandeur a délimité une zone de chalandise incluant les communes situées à moins de vingt minutes en voiture du projet, dont la population s’élevait en 1999 à 12 000 habitants. Les services instructeurs, d’une part, ont réintroduit dans la zone de chalandise, certaines communes dont celle de Saint-Claude, distante de moins de vingt minutes où sont implantés plusieurs supermarchés concurrents, et, d’autre part, ont élargi le périmètre de cette zone pour y inclure des communes distantes de 20 à 25 minutes du projet.

Ces corrections ont eu pour effet de faire passer le nombre de communes concernées de 20 à 42 et de multiplier par près de trois la population en cause.

Les graves lacunes entachant la délimitation de la zone de chalandise dans le document produit par le demandeur ne permettaient pas de regarder ce document comme constituant l’étude destinée à permettre d’apprécier l’impact prévisible du projet au regard des critères légaux. Si la commission nationale a également examiné la demande, en considération de la zone de chalandise plus vaste définie par les services instructeurs, les pièces versées au dossier soumis à son examen ne lui permettaient pas, compte tenu de l’importance des modifications apportées par les services, d’apprécier l’impact prévisible du projet au regard des critères légaux dans la zone de chalandise rectifiée. En statuant ainsi, sans demander préalablement au pétitionnaire de compléter les données figurant dans son dossier, afin de tenir compte de la modification de la zone de chalandise, la commission nationale a entaché sa décision d’illégalité.

Régularisation d’une exploitation faite sans autorisation

Conseil d’Etat 25/01/06- SOCIÉTÉ ANGÉLIQUE FLEURS et autres

Confirmation de la légalité d’une décision du 27/01/05 par laquelle la CNEC a autorisé la S.A.R.L. « Leader Beaumont » à étendre, par régularisation de 45,43 m², un supermarché « LEADER PRICE » de 299,58 m² portant sa surface de vente totale à 345,06 m², à Nice (Alpes- Maritimes).

La décision de la CNEC accordant l’autorisation requise en vue de l’extension par régularisation de 45 m² d’un supermarché « Leader Price », doit être regardée, non comme autorisant une extension, mais comme autorisant par régularisation l’exploitation faite sans autorisation. Par suite, le dossier de la demande n’avait pas à inclure l’attestation de l’ORGANIC exigée par l’article 18-1 du décret du 26 novembre 1996.

Le fait que le supermarché « Leader Price », soit exploité depuis juin 2002 sans l’autorisation requise par l’article L. 720-5 du code de commerce, ne constituait pas un motif légal pour rejeter la demande qui devait être uniquement appréciée au regard des articles L.720-1 à L. 720-3 du même code.

La densité commerciale de la zone de chalandise en magasins à dominante alimentaire est restée, avec l’ouverture du supermarché « Leader Price », largement inférieure aux moyennes départementale et nationale de référence. Ainsi, l’équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce, n’est pas compromis par le projet. La CNEC pouvait donc délivrer l’autorisation demandée sans avoir à se prononcer sur les autres effets du projet. Le moyen tiré de ce que les travaux ont été réalisés sans permis de construire ne peut être  utilement invoqué à l’encontre de la décision attaquée.

Insuffisances entachant la délimitation de la zone de chalandise

Conseil d’Etat 25/01/06- SOCIÉTÉ ARPEL-CHAMBRE DE MÉTIERS DE L’HÉRAULT

Annulation d’une décision du 16/12/04 par laquelle la CNEC a autorisé la S.C.I. « Les Portes de la Mer » à créer, à Lunel (Hérault), un magasin alimentaire spécialisé de 950 m² de surface de vente, à l’enseigne « GRAND FRAIS ».

À l’appui de sa demande, la SCI « Les Portes de la Mer » a défini une zone de chalandise incluant des communes situées à moins de vingt minutes du site mais excluant la commune de Saint-Aunès, distante elle aussi de moins de vingt minutes du lieu d’implantation du projet. En raison de cette exclusion, qui ne peut être justifiée, ni par les conditions d’accès au site ni par le temps de déplacement nécessaire pour y accéder en provenance de la commune de Saint-Aunès, l’hypermarché « E. Leclerc » de 8 100 m² n’a pas été pris en compte dans le recensement des équipements commerciaux relevant du même secteur d’activité que celui du projet en cause.

Les insuffisances entachant ainsi la délimitation de la zone de chalandise, qui n’ont pas été rectifiées au cours de l’instruction, ont conduit la CNEC à se prononcer sur la base de données incomplètes et inexactes qui ne l’ont pas mise à même d’apprécier l’impact du projet au regard des critères fixés par le législateur.

Contenu du dossier de demande, commerces de détail alimentaire, concurrence

Conseil d’Etat 28/06/06- ASSOCIATION EN TOUTE FRANCHISE HAUTE GARONNE et autres

Confirmation de la légalité de deux décisions du 9 septembre 2004 par lesquelles la CNEC a autorisé la société « Hellau » à créer un ensemble commercial de 2 590 m² comprenant un supermarché « SUPER U » de 2 240 m² et une galerie marchande de 350 m² et la création d’une station-service annexée disposant de 7 positions de ravitaillement, à Flourens (Haute-Garonne)

Le moyen tiré de ce que les membres de la CNEC n’auraient pas reçu l’ordre du jour de la séance accompagné des documents mentionnés à l’article 30 du décret du 9 mars 1993, manque en fait.

En se fondant sur l’augmentation de la population, les densités commerciales dans la zone de chalandise dans le secteur alimentaire, la stimulation de la concurrence, le ralentissement de l’évasion commerciale, l’emprise limitée du projet sur le commerce traditionnel, et sur l’amélioration du service rendu s’agissant de la station-service, la CNEC a suffisamment motivé ses décisions.

Il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire justifiait des titres l’habilitant à construire.

Si la délimitation de la zone de chalandise retenue par le pétitionnaire conduisait à exclure des communes distantes de dix à vingt minutes du site du projet, situées à l’est de l’agglomération toulousaine, les services instructeurs ont rectifié cette zone pour y inclure les communes de Balma et de Pin-Balma, voisines de Flourens. En outre, eu égard aux caractéristiques du projet, le pétitionnaire a pu légalement ne pas inclure dans la zone de chalandise certaines communes situées à l’est de Toulouse. S’agissant des installations de distribution de carburants, la CNEC a tenu compte des stations annexées à des grandes et moyennes surfaces de la zone de chalandise et de deux stations de raffineurs à Balma. En outre, l’installation de Saussens n’était pas ouverte au moment du dépôt du projet et n’avait pas, eu égard à sa taille, à faire l’objet d’une autorisation, et celle de Caraman, dépendant d’un garage, n’offrait pas les mêmes services que ceux de l’équipement projeté.

Le dossier de présentation de création du supermarché comporte les plans du magasin projeté ainsi qu’une description des capacités pour le chargement et le déchargement des marchandises. S’agissant d’un nouvel équipement, le pétitionnaire n’avait pas à fournir un plan indicatif des façades ou des photographies, exigés par les dispositions du 1.2 du I de l’annexe 3 de l’arrêté du 12 décembre 1997 pour les magasins existants. L’étude d’impact concernant cet équipement comporte la liste des petits commerces de la zone de chalandise, des cartes permettant de localiser les commerces de Flourens et de Drémil-Lafage, la liste de l’ensemble des activités de ces deux localités ainsi qu’une description des pôles commerciaux de Caraman et de Lanta. Si la description de la desserte publique du site comporte une inexactitude et si le nom de l’employeur du personnel du supermarché en projet n’est pas expressément mentionné, ces insuffisances ont été sans influence sur les décisions de la CNEC. Le dossier analyse l’impact du projet sur les flux de voitures particulières et de livraison et fournit ainsi des renseignements sur la fréquentation automobile, suffisants pour permettre à la CNEC d’apprécier l’impact du projet au regard du 1° du I de l’article L. 720-3 du code de commerce. Si le terrain d’assiette du projet est actuellement classé en zone agricole, la commune de Flourens a entrepris  une modification du POS prévoyant le développement du site du Moussard où le projet contesté devrait être réalisé.

Ainsi, l’implantation, dès lors qu’elle ne fait pas obstacle par elle-même à la réalisation d’une liaison verte en bordure de la RN 126, n’est pas incompatible avec le schéma directeur de l’agglomération toulousaine, ayant valeur de schéma de cohérence territoriale.

Les besoins commerciaux de la zone de chalandise connaissent une expansion rapide eu égard à l’important accroissement démographique constaté entre les deux derniers recensements. Les densités commerciales en commerces de détail alimentaire, sur lesquels la CNEC a pu notamment, fondé ses décisions, demeureront, même après réalisation du projet, inférieures à celles constatées tant au niveau national que dans l’agglomération toulousaine et le département de la Haute-Garonne. Les effets de la concurrence s’exerceront essentiellement sur les autres grandes surfaces de la zone de chalandise et les centres commerciaux situés hors de celle-ci dans l’est de la périphérie toulousaine, mais ne devraient pas avoir d’effet sensible sur le petit commerce traditionnel dans les centres-villes de la zone de chalandise. S’agissant de la distribution de carburants, si cette zone compte cinq installations et que les centres commerciaux périphériques hors de celle-ci offrent trente trois positions de ravitaillement, la densité commerciale demeurera, après la réalisation du projet, inférieure aux moyennes nationale et départementale. Dans ces conditions, le projet d’ensemble commercial autorisé n’est pas de nature à provoquer, ni l’écrasement de la petite entreprise, ni le gaspillage des équipements commerciaux.